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Libération
Critique

Occident pour dent

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Un essai du philosophe Alain Badiou qui moque nos pseudo-indignations de repus.
publié le 24 avril 2003 à 22h58

Avant d'avoir le droit de vomir sur Bush et son impérialisme, il serait de bonne guerre de se flageller un peu. C'est la sage précaution que prend pour nous le philosophe Alain Badiou, puisqu'il violente son lecteur afin de le faire penser sinon plus droit, du moins plus raide. En effet, Badiou tire tous azimuts sur les «démocraties occidentales». Pour être plus précis, le terrorisme est pour l'ancien rival de Deleuze la seule méthode de salut public et, à coups d'ironie et de pirouettes dialectiques, il se révèle, au fil des trois articles de ce recueil, capable de réveiller un marxiste-léniniste mort.

Si vous avez eu «honte» ou «peur» le 21 avril 2002 en voyant Le Pen à la télé, c'est que vous êtes un veule crétin. Non pas que Le Pen soit un personnage recommandable, mais pour Badiou il ne fait qu'incarner de façon crue ce à quoi les Français aspirent plus ou moins. De toutes façons, «la quasi-totalité des plumitifs démocrates» ont découvert «avec délices la conscience sécuritaire» et, écrit-il, c'est une «idée partout dominante que celle, réservée naguère à l'extrême droite, que le mot "occident" désigne une civilisation supérieure». Ce contre quoi «pendant deux semaines, une petite France s'est levée, n'est rien que la forme vieillie, dépliée, excessive et explicite, de ce que cette France tolère afin de persévérer dans son être». Tout au long de Circonstances 1, Badiou le répète, ce que nous nommons «démocratie», c'est «mon confort, ma petite jouissance, et qu'on me fout