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Critique

Giordano brio.

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Le philosophe hérétique italien Giordano Bruno élucide un crime inexpliqué dans le Paris d'Henri III, où l'on croise, entre autres, Shakespeare.
publié le 22 mai 2003 à 23h05

En 1582, une bulle du pape Grégoire XIII remplace le calendrier julien par le calendrier grégorien : le 15 octobre succède à Rome au 4 octobre. Dans la France catholique d'Henri III, ce changement s'effectue en décembre et provoque un certain désordre : dix jours n'auront jamais existé. Jacques Bonnet place son premier roman, une enquête menée par le philosophe Giordano Bruno sur un fait divers sanglant, pendant ces journées absentes : du 10 au 19 décembre. Il occupe, librement et sans le révéler dans son livre, en truite espiègle et narrative, un trou de l'Histoire.

La substance du fait divers est tirée d'un passage des Registres-Journaux de Pierre de L'Estoile. Cet audiencier à la chancellerie du Parlement, célèbre mémorialiste de l'époque, dressa son herbier quotidien des événements de 1574 à 1611. Il est très sûr lorsqu'il évoque des faits survenus à Paris. Le massacre qu'il rapporte brièvement le 10 décembre se déroule justement à Paris. Le texte est précis. Mais il est faux : Bonnet l'a inventé. A l'enseigne de l'amitié est une oeuvre gigogne, semée de faux documents d'époque et de petits pièges pour érudits.

L'enquête est relatée par le jeune Jean Hennequin, maître ès arts et disciple de Giordano Bruno. Son manuscrit, nous apprend le prologue, a été découvert dans une vieille édition du Chandelier de Bruno par l'auteur du livre... qui est et qui n'est pas Jacques Bonnet. Tout est faux, mais tout semble vrai, car le fond du tableau est vraisemblable jusque dans le plus p