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Libération
Critique

Sortir des urnes

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Des illusions du système démocratique libéral, par l'helléniste Luciano Canfora.
publié le 29 mai 2003 à 23h11

Du procès de Socrate à l'élection de G.W. Bush, dit le sous-titre de l'un. Photius censuré dans la France de Mazarin, dit celui de l'autre. Dans le premier, un essai politique incisif, radical, on se demande par exemple si la décision majoritaire est vraiment juste, si ce qui gouverne est la politique ou la finance, si la gauche est obligée de perdre presque toujours les élections, si les révolutions sont toutes vouées à l'échec... Le second est une étude historique et philologique, une spy story érudite, peuplée de chanoines, de libraires et d'évêques, où les indices sont des épigraphes latines ou grecques, et dont les péripéties, qui trouvent leurs sources dans l'antique Constantinople, conduisent, en pleine tempête antijanséniste, à la cathédrale Notre-Dame de Rouen et à ses bibliothèques secrètes. On a peine à réaliser que les deux ouvrages sont du même auteur. C'est qu'en réalité il y a «plusieurs» Luciano Canfora. D'un côté, l'«intellectuel organique», le président de Socrate, Association nationale pour la culture et l'unité de la gauche, l'éditorialiste du Corriere della Sera, le militant politique, qui se présente aux élections européennes sur les listes du Parti des communistes italiens d'Armando Cossuta ­ lequel tient encore haut le drapeau rouge, avec les effigies de Marx-Engels-Lénine-Staline. De l'autre, le savant et le chercheur, détenteur de la chaire de philologie grecque et latine de l'université de Bari, qui a enseigné la papyrologie, la littérature et l'hi