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Libération
Critique

La main dans l'humain .

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Un recueil des travaux, souvent graves, parfois drôles, du Britannique George Rodger, cofondateur de l'agence Magnum, pionnier du photojournalisme, disparu en 1995.
publié le 12 juin 2003 à 23h21

C'est l'Afrique qui sauvera George Rodger (1908-1995) du désespoir où l'avaient plongé les camps de concentration, qu'il fut l'un des premiers à photographier alors qu'il travaillait pour le magazine Life. Personne ne peut oublier ce petit garçon juif néerlandais marchant le long des arbres, à Bergen-Belsen, et qui fixe l'objectif du photographe, alors qu'à droite de l'image des corps gisent à moitié nus, entassés, jetés dans l'oubli. «Je les croyais endormis sous les pins», dira Rodger, tout à coup «stupéfait de se voir en train de chercher le meilleur cadrage de l'amoncellement des cadavres». Mais il ira au bout de son reportage (portraits des surveillantes du camp, ramassage des morts, survivantes en pantalon rayé), puis retrouvera l'espérance au Soudan avec les lutteurs noubas, dont les silhouettes puissantes, recouvertes de cendres de bois avant le combat, semblent surgir d'un autre temps. Un peu comme George Rodger lui-même, à part dans le monde du photojournalisme, ainsi que le montre ce gros livre, Humanité et inhumanité, roman-fleuve qui déroule le beau regard silencieux de l'un des fondateurs de l'agence Magnum Photos, dix-huit fois médaillé pour faits de guerre, et qui tomba par hasard dans le bain de la photographie après avoir fait deux fois le tour du monde dans la marine marchande britannique.

La guerre est une part importante des archives Rodger, du blitz à Londres à la libération du Danemark par l'armée britannique, «(...) la lumière au bout du tunnel. Le dra