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Critique

Le tour des Français...

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Réédition de l'ouvrage de Léon Curmer, vision panoramique, naturaliste et illustrée de tous les personnages de la société française du XIXe siècle.
publié le 12 juin 2003 à 23h21

Inquiète des mutations qui bouleversaient alors la société, la première moitié du XIXe siècle fut continuellement hantée par la question de sa représentation. Une véritable fièvre d'autoanalyseÊen résulta, qui prit surtout la forme d'enquêtes sociales et de statistiques «morales». Mais la littérature ne fut pas en reste, multipliant les Tableaux, Physiologies, Codes, Guides et autres Monographies, auxquels Benjamin proposa, dans ses fragments sur Paris, de donner le nom de «littérature panoramique». Publiés pour la première fois en 1839, les Français peints par eux-mêmes constituent sans doute l'exemple le plus ambitieux et le plus abouti de cette production, qu'une réédition permet aujourd'hui de redécouvrir.

Le livre, tout comme les Physiologies, fonctionnait sur le principe du «type» : ramasser en une quinzaine de pages, rehaussées de quelques gravures bien senties, les principaux traits sociaux, moraux et physiques d'une figure du temps. Si l'idée, empruntée au modèle alors dominant des sciences naturelles, n'était pas originale, l'éditeur Léon Curmer sut la pousser à bout. En visant l'exhaustivité, en juxtaposant dans le même ouvrage «les physionomies les plus saillantes de l'époque», il comptait parvenir à une sorte d'«anthroporama», capable «de réfléchir l'époque actuelle dans son ensemble et dans tous ses détails» et de se hisser au rang d'Encyclopédie morale du XIXe siècle. Plus de 400 monographies furent ainsi publiées, depuis «L'Epicier» (rédigé par Balzac), qui ou