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Libération
Critique

Sur le pied de guerre.

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Haines tribales, terres en flammes: «la Guerre du foot» ou les conflits sauvages des années 60 vécus par Kapuscinski.
publié le 12 juin 2003 à 23h21

Trois ans après le magnifique Ebène, Ryszard Kapuscinski revient avec un recueil de nouveau largement consacré à l'Afrique, la Guerre du foot. Pourtant le titre renvoie à un récit éponyme, qui se déroule entre le Honduras et le Salvador, en juillet 1969, quand une guerre opposa quelques jours durant ces deux petits Etats, adversaires acharnés dans la Coupe du monde de football. «La guerre du foot a duré cent heures. Elle a fait six mille morts, quelques milliers de blessés. Près de cinquante mille hommes ont perdu leur maison et leurs terres. De nombreux villages ont été détruits.» Derrière ces chiffres terribles, une réalité explosive, que démonte le journaliste polonais, né en 1932 et auteur de récits hors du commun comme le Négus ou le Shah : un pays petit, surpeuplé, le Salvador, et un pays plus grand, peu peuplé, le Honduras, avec une forte minorité d'immigrants salvadoriens que le pouvoir veut chasser.

Loin d'une démonstration sociologique, Kapuscin-ski raconte sa montée au front, comment tous ses collègues journalistes se débinent les uns après les autres plus la zone des combats s'approche. Comment il se retrouve au milieu d'une clairière pleine d'agonisants, sans qu'on puisse reconnaître les blessés, les soldats des deux camps portant le même uniforme : «C'est un des nôtres ou un des leurs ? a demandé un soldat assis près de la civière. ­ On n'en sait rien, a répondu l'infirmier après un silence. ­ C'est le fils de sa mère, a dit un soldat debout. ­ Maintenant, c'est