Rémi Langevin, professeur de mathématiques à l'université de Bourgogne, ne se souvient pas de la date exacte de cette journée qu'il a passée, «au début des années 80», avec son grand-père, Fernand Chavannes, dans l'entresol de la maison de ce dernier, à Fontenay-aux-Roses, entre une malle et une chaudière. En revanche, il revoit parfaitement la scène. Dans la malle, il y a les effets d'une dame née au crépuscule du XIXe siècle et morte quelques années auparavant , Isabelle Chavannes, la soeur aînée de son grand-père, l'une des premières Françaises ingénieur. Le vieil homme lui passe les objets un à un, Rémi doit trancher vite : la chaudière ou le sursis. Les choses d'une vie défilent, passe un petit classeur brun, enserrant une liasse de feuilles jaunes où chemine une belle écriture sans rature et des schémas d'écolier. Rémi Langevin commente aujourd'hui sobrement : «J'ai eu de la chance d'être là.»
Après vingt ans de circulation confidentielle, le manuscrit vient d'être publié, intégralement, par l'éditeur favori de la Société française de physique, EDP Sciences. Il s'agit du récit de dix leçons de physique élémentaire suivies par Isabelle Chavannes en 1907. Et de bien plus : c'est l'unique témoignage direct d'une expérience pédagogique révolutionnaire conduite, il y a près d'un siècle, par une bande d'amis qui était également une bande de Nobel et autres gloires de l'esprit.
«Qu'est-ce qu'il y a dedans?»
«Résumé de la leçon de physique faite à la Sorbonne par Madame Curie pou