Ambrogio Lorenzetti est célèbre dans l'histoire de l'art pour avoir peint à Sienne au milieu du XIVe siècle un cycle de fresques assez extraordinaire, celles du Bon et du Mauvais gouvernement. Situées dans l'une des salles les plus imposantes du Palazzo Pubblico, ces fresques ont d'évidence pour but de transmettre des messages politiques. Lesquels ? C'est ce que cherche à découvrir Quentin Skinner, l'un des meilleurs connaisseurs de la pensée politique entre le Moyen Âge et le XVIIIe siècle, domaine dans lequel s'illustrent particulièrement les historiens britanniques.
L'originalité de ce livre est de considérer ces fresques comme un texte, capable de porter les stratégies visuelles des communes italiennes. Les images peintes au Moyen Âge dans les édifices publics et les églises jouaient un rôle pédagogique important car elles touchaient un bien plus grand nombre de personnes que les livres qui ne sortaient guère des monastères. Le coeur de la démonstration tient dans le fait que, contrairement à ce que pensent les historiens de l'art, le programme des fresques de Lorenzetti n'a pas été inspiré par Aristote, relu et adapté au christianisme par Thomas d'Aquin, mais par la culture pré-humaniste qui s'imposa dans les républiques italiennes pendant les premières années du XIIIe siècle, c'est-à-dire avant la redécouverte des oeuvres d'Aristote. Or cette culture civique trouvait elle-même son inspiration morale et politique dans des textes stoïciens (en particulier de Cicéron) écri