Le Letton Eriks Adamsons (1907-1946) ménage dans ses nouvelles des surprises renversantes. Prenons l'exemple du comptable Aleksandrs Papirs, le sympathique héros du premier récit. Ce garçon, qui ne quitte guère l'immeuble où il travaille, puisqu'il y vit, est pris à partie dans l'escalier par un gamin de 4 ans, en train de jouer avec un pantin de bois. Soit dit en passant, Papirs est présenté comme «timide au point de n'être pas même capable d'adresser la parole à un enfant». Ce n'est que sagesse. L'enfant : «Eh, dis donc ! Tu regardes un peu où tu marches ? Tu vas écraser Habacuc !» Aleksandrs Papirs demande, poliment, on en jurerait, qui c'est. «C'est toi !», répond l'enfant.
Dès l'instant où le pantin Habacuc glisse à travers les barreaux, tombe dans la cage d'escalier et se casse, Aleksandrs Papirs voit sa vie basculer. Il a des idées. Il jette des choses, non plus sur le papier, mais dans l'escalier. Il pense à des mots. Une odeur d'oeuf pourri lève dans sa mémoire le mot Popocatépetl. Eriks Adamsons adore les grands noms étrangers. Au fil des textes, il cite un scribe du temps d'Hammourabi, les jardins d'Aranjuez, le duc du Devonshire. Il en invente, comme ce Philippe Le Borgne que les traducteurs n'ont pas trouvé dans l'arbre des rois de France. La culture lui est-elle naturelle ou est-elle pour lui réductible à sa charge d'exotisme ? Certaines comparaisons nous feraient pencher. Ainsi, la discussion de commères vue par Aleksandrs Papirs : «Leurs voix venaient jusqu'à