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Pinter, l'emporte-pièces

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Pilier du théâtre britannique, adaptateur de Proust pour Joseph Losey , Harold Pinter est aussi un poète en «Guerre». Rencontre à la recherche du temps perdu.
publié le 3 juillet 2003 à 23h39

Harold Pinter n'a que 72 ans. Que 72 ans, parce que les monuments n'ont pas d'âge, parce qu'on a du mal à imaginer comment le théâtre anglais contemporain aurait pu faire sans. Pinter, comme le remarque son biographe Michael Billington, a eu droit très tôt à l'épithète «pinteresque», entrée dans le New Shorter Oxford English Dictionary. On parle aujourd'hui de pause pinteresque, ou de style pinteresque. Plus que tout autre dramaturge de sa génération outre-Manche, il incarne une certaine idée du théâtre et son nom se détache sans doute de manière plus singulière du reste de la scène britannique d'après-guerre. L'après-guerre: les «Angry Young Men», des jeunes gens en colère, John Osborne, en tête, avec Look back in anger (la Paix du dimanche, 1956) critique virulente d'une Angleterre sclérosée. C'est l'époque des Edward Bond, des Arnold Wesker, des John Arden, des Joe Orton, des auteurs, la plupart de milieu ouvrier qui veulent en découdre avec un théâtre pseudo-shakespearien et lyrique ou avec les drames bourgeois. Toute une époque avec ses lieux: le Royal Court Theatre, la Royal Shakespeare Company. Un nouveau théâtre est né. Et, dans cette effervescence des années cinquante, un comédien originaire de l'Est londonien, Harold Pinter, signe des pièces où se déploie une langue faite d'argot, de ruptures et de silence. Scansion originale, décor sobre et domestique, personnages captifs d'un huis clos où la tension se glisse tel un autre personnage. Théâtre de la menace, où autr