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Libération
Critique

Yehoshua. Sion et lumières .

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«La Mariée libérée», ou le roman de la coexistence nécessaire. Rencontre à Haïfa avec le plus balzacien des écrivains israéliens.
publié le 11 septembre 2003 à 0h56

Avraham B. Yehoshua est sans doute l'un des rares écrivains israéliens modernes de type balzacien. Il embrasse la réalité, pour le moins difficile, de son pays, il l'étreint à bras-le-corps. Et s'ébat au coeur des intrigues avec une jubilation de bénédictin athlétique. Sa Mariée libérée (1) mêle plusieurs niveaux de récits. Une histoire familiale d'abord : celle de l'orientaliste Yohanan Rivline, que le divorce soudain de son fils Ofer, après une année de mariage avec Galia, désespère et qui tente d'élucider le mystère de cette brutale séparation. Face à lui, son épouse, Haguit, juge rationnelle et réaliste, qui le dissuade de se torturer et de harceler son fils.

Autour et au coeur de ce noeud, une galerie d'orientalistes de l'université d'Haïfa, leurs étudiants arabes, dont Samaher, étudiante fantasque, habile manoeuvrière, que Rashed, amoureux fou, mais «un peu trop noir de peau», ne pourra pas épouser. Rashed, comme guide et passeur entre Juifs et Arabes, entre Israéliens et Palestiniens des Territoires. Emergent aussi les recherches sur les années précédant l'indépendance de l'Algérie, menées par un jeune assistant, Yossef Souissa, mort dans un attentat, qui serviront au professeur Rivline afin de comprendre les ravages de la guerre civile contemporaine algérienne.

Le roman est ambitieux, effectuant des allers-retours entre Juifs et Arabes israéliens, entre eux et les Palestiniens. L'une des scènes les plus fortes est le concours poétique, à Ramallah, en arabe et en hébreu