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Libération
Critique

Les oiseaux vont mourir à Paris

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Les ballades drôles et mélancoliques du Péruvien Bryce-Echenique, qui fut vingt ans parisien.
publié le 18 septembre 2003 à 1h02

De 1964 à 1984, le romancier péruvien Alfredo Bryce-Echenique vit en France : la bohème d'abord, le professorat ensuite. A Paris, il a vingt ans, trente ans. Il s'assied aux terrasses de café, boit à crédit, regarde les femmes, les attire, aiguise sur elles son donjuanisme andin, discute pendant des heures avec toutes sortes d'albatros sud-américains de passage. Ses phrases gardent quelque chose de ce temps-là : elles semblent écrites sur un guéridon entre deux verres de rouge, comme des prolongements imaginaires de conversation. Elles en ont le négligé, la familiarité, l'absence de rythme, la longueur pleine d'incises, tout le «mal écrit» qui vous prend par la main et vous fait entrer dans la ronde d'un conteur. En résumé, elles sont bonnes vivantes et râpées jusqu'au naturel, comme une veste anglaise de seconde main.

Dans ces années parisiennes, des tas de Péruviens croisent et envahissent le futur auteur, qui vit sous les toits du cinquième arrondissement et craint ses terribles concierges. Ces Péruviens le font vivre et rêver. Leurs destins sont picaresques : à la fois comiques, invraisemblables et désespérés. Le Guide triste de Paris rassemble quatorze histoires ou portraits, individuels ou de groupes, évoquant la ville de ces émigrants, personnages de sa jeunesse ou inventions de sa vieillesse. Il y a un peintre méconnu dont les os se brisent car il ne mange pas, préférant «dormir ses repas». Il y a un couple qui manque de rompre à cause d'un chat noir. Il y a l'homme q