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Libération
Critique

Sus à l'infidèle.

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Attractions et rejets dans les relations entre l'Islam et la Chrétienté. Au Moyen Age.
publié le 18 septembre 2003 à 1h02

Il fut un temps où l'islam faisait figure de méchant diable venu d'Orient auprès de chrétiens apeurés et sur la défensive face à une civilisation qui les dépassait en puissance militaire, en rayonnement intellectuel, en richesses et art de vivre. Un temps très long, du VIIe au XVe siècles au moins, de la fulgurante conquête arabe d'une bonne partie de la chrétienté d'alors (toute la rive sud de la Méditerranée et même un bout de notre bord : le Proche-Orient, l'Afrique du Nord, l'Espagne) jusqu'à la prise de Byzance par les Turcs en 1453. Aussi, au cours de presque tout le Moyen Age, l'Occident chrétien s'est-il demandé pourquoi Dieu, son Dieu, avait voulu le punir si cruellement. Aujourd'hui ­ après que la colonisation et le triomphe du capitalisme ont occulté cette longue histoire ­, les rôles se sont inversés, les frustrations et l'invective ont changé de camp et ce sont désormais les musulmans qui se demandent jusqu'à quand les accablera le grand satan occidental. C'est cette persistante combinaison d'attraction et de rejet du monde musulman au sein de la chrétienté qu'éclaire John Tolan avec les Sarrasins. L'islam dans l'imagination européenne au Moyen Age. Américain, né en 1959, formé aux Etats-Unis et en Europe, John Victor Tolan est professeur d'histoire médiévale à l'université de Nantes.

Pour cadrer les rapports entre chrétiens, musulmans et l'image qu'ils se font les uns des autres au Moyen Age, il faut rappeler un point commun, dont découle tout le reste, à savoir