Menu
Libération
Critique

Le bonjour d'Elfriede

Article réservé aux abonnés
Une endoscopie de l'abjection par l'auteur de «la Pianiste».
publié le 25 septembre 2003 à 1h07

Ce serait une explosion de moisissures et de pourriture sur on ne sait quel support, nourriture ou marécage de cadavre, tels que les exposait en 1987 la photographe Cindy Sherman, dans une série de très gros plans sans titre. Ou alors, le syndrome du Chef-d'oeuvre inconnu, vaste embouteillage d'où n'émerge qu'un pied, sublime certes, mais reliquat unique et malheureux d'un tableau pollué. Roman de la démolition, roman en démolition, Avidité atteint, en effet, les limites sinon du lisible, du moins du traduisible.

Là, la littérature se réduit à la langue, au jeu sur la langue, ce qui condamne le traducteur à cette expérience des voyageurs désirant honorer leurs hôtes d'une recette où ils sont passés maîtres, mais qui échouent parce qu'aucun ingrédient n'a la même saveur que dans son pays d'origine, rien ne s'accorde, il eût fallu cuisiner tout autre chose, rendre l'effet plutôt que la lettre, entreprise impossible. Avidité appelle de même à une trahison maximale.

On lit donc en se demandant à quoi peut bien ressembler Gier. Ein Unterhaltungsroman (1). Les jeux de mots ont-ils plus de pertinence dans leur langue maternelle ou bien ne servent-ils qu'à agacer ? Les cataclysmes syntaxiques y sont-ils atténués ou bien faut-il déchevêtrer les mêmes écheveaux ? La seule chose assurée, c'est la mauvaise volonté de la narratrice qui, au bout de huit pages, se moque déjà de son lecteur : «Nous l'apprendrons ou nous ne l'apprendrons pas, selon que je saurai m'exprimer de manière compréhen