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Interview

La Cité de Castel

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De la sociologie de la psychanalyse et de la psychiatrie à celle de la marginalité et du travail, le parcours, varié mais cohérent, de Robert Castel.
publié le 2 octobre 2003 à 1h13

Pourquoi avez-vous délaissé la philosophie pour la sociologie ?

J'ai commencé par enseigner cette matière au lycée, ensuite j'ai été l'assistant d'Eric Weil à la faculté des lettres et des sciences de Lille. A l'époque, au début des années 1960, les philosophes, à l'instar de mon maître, travaillaient beaucoup sur la logique de la philosophie. J'ai vite compris que je n'avais pas grand-chose de nouveau à dire au niveau philosophique sur la question du sens ­ recherche qui me retient encore et sur quoi je gambergeais alors. Pour aller vite, je voulais déplacer cette interrogation vers des objets qui ne soient pas de purs concepts. Ensuite, j'ai rencontré Pierre Bourdieu. Il enseignait lui aussi à Lille la sociologie. On est devenu très amis, dînant ensemble tous les mardis, on parlait de tout et de n'importe quoi. Je lui ai fait part de mes doutes, de mon balancement. Il m'a encouragé à aller voir comment on faisait de la sociologie concrètement. Je me suis mis à fréquenter le Centre de sociologie européenne où Bourdieu, qui le dirigeait un peu sur délégation d'Aron, était très actif.

Vous devenez l'élève de Raymond Aron ?

Avec Aron, j'ai fait une thèse autour de la psychiatrie et de la psychanalyse. En France, ce domaine n'était pas un véritable objet sociologique. Certes, j'avais lu et admiré l'Histoire de la folie de Foucault, mais c'est Erving Goffman qui m'a véritablement influencé quand j'ai eu cette idée de sociologiser le traitement de la maladie mentale. J'en ai parlé à