Le dialogue, d'une certaine manière, est le contraire de la discussion. Celle-ci est violence, l'autre pas. Dans la discussion, et dans le débat, il s'agit de battre, de casser, de fendre et séparer (dis), de «secouer» (quatere) l'interlocuteur, d'agiter en tous sens les arguments, comme on le fait avec un shaker, pour que «quelque chose» sorte, la vérité parfois, la raison de l'un et les torts de l'autre le plus souvent. A cette fin, tout est bon : les ruses dialectiques, les tours de rhétorique, les arguties, l'échauffement des esprits, les tirades enflammées, la passion. Au dialogue sied au contraire la subtile géométrie argumentative : il est tout de raison. On ne dialogue pas les uns contre les autres, mais ensemble, et avec le souci partagé qu'à travers (dia) l'échange de paroles sensées puisse peu à peu se tisser la trame de la vérité : logos.
A entendre les discours politiques et médiatiques, l'Occident et l'Orient arabo-musulman, assurément, discutent. A quelles conditions pourrait «renaître» entre eux un dialogue, issu d'un héritage commun et capable de l'exhiber de nouveau ? C'est à cette question, exigeant un «retour à la Renaissance», que répond l'essai philosophique de Cynthia Fleury Dialoguer avec l'Orient.
Seul Francis Fukuyama a pu sottement soutenir que l'on avait atteint «le terme de l'évolution idéologique de l'humanité et de l'universalisation de la démocratie libérale occidentale», et, par suite, que l'avenir ne serait plus fait de débats d'idées exaltés