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Libération
Critique

Défaits d'hiver

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Dennis Cooper est bien le fils spirituel de Burroughs et de Genet.
publié le 4 décembre 2003 à 2h11

Dennis Cooper a écrit Défaits derrière une vitre de pluie. On ne voit qu'à peine, les personnages et les objets coulent le long de la page, ce sont des masses de couleur, un certain éclairage, des ruisseaux lumineux découpant chaque action, pensée ou figure en lamelles grelottantes. Les personnages n'ont pas de corps, presque pas de noms , leur visage est celui du désir dans toutes ses machines (sadisme, inceste, schizo). Connu en France grâce à Guide en 2000, Dennis Cooper est, rappelons-le, le fils spirituel de Burroughs et le petit-fils de Jean Genet ­ par alliance. My loose thread (titre original) devait à l'origine être un document, Cooper avait achevé en 2000 le cycle romanesque de Georges Miles ( Closer, Frisk, Try, Guide et Period), une histoire de disparition ou de mutilation, on ne sait plus, un peu des deux, une ascension ascétique vers l'amour fou.

Mais My loose thread (intraduisible, évoquant la perturbation, le décousu), parti d'une enquête sur les lycéens tueurs (pas ceux d'Elephant, trop falots pour Cooper et pas assez gays), est devenu un roman, sans adultes, sans Dennis, sans personne, car l'auteur nous place dans la tête de son narrateur, Larry, tête assez psychotique pour nous faire faire des tours de manège carrément bluffants.

On finit par comprendre que Larry couche (ou imagine qu'il couche) avec son frère Jim, qui a treize ans, qu'il se croit coupable du meurtre de Rand, un copain qu'il a violemment frappé à la tête, qu'il est chargé (ou se croit chargé