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Critique

La banane est derrière la caisse

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Langage, nombres, musique et loi de la gravité : vingt ans de recherches sur le fonctionnement de l'esprit de l'homme et de ses parents proches.
publié le 11 décembre 2003 à 2h17

Ça pourrait être un film burlesque, un genre de Charlot au zoo, c'est une expérience scientifique. Sarah, une femelle chimpanzé, regarde un film où Keith, un mâle humain enfermé dans une cage, essaie d'attraper un régime de bananes accroché hors de sa portée. Le film s'arrête, on donne à Sarah trois photos, elle doit identifier celle qui représente la solution au problème de Keith. Le test est ensuite répété avec d'autres épreuves : Keith veut des bananes coincées derrière une caisse, Keith essaie d'utiliser un tuyau mal branché... A chaque fois, Sarah doit trouver la bonne photo. Résultat ? 18 bonnes réponses sur 20. La question était : «Les chimpanzés ont-ils une théorie de l'esprit, peuvent-ils attribuer des états mentaux à autrui ?» La réponse est : «Oui, au moins une forme rudimentaire».

Depuis sont passés vingt ans de recherches sur le fonctionnement de l'esprit humain, racontées par David et Ann Premack dans le Bébé, le singe et l'homme. Cela fait longtemps que les linguistes, neurobiologistes, philosophes et autres spécialistes des sciences cognitives ont abandonné l'idée de l'intelligence et de l'esprit humain vus comme un tout. Depuis vingt ans, expliquent les Premack, les chercheurs ont montré que «les enfants héritent d'attentes concernant la manière dont agissent les objets physiques, mais aussi les objets psychologiques et biologiques, le langage, les nombres, la navigation spatiale et la musique». Ces attentes font partie des «modules» de l'enfant (et parfois d