Jacques Lacan l'appelait «la vaillante». Exceptionnel fut en tout cas le destin de Jenny Aubry (1903-1987), grande dame qui traversa le siècle dernier. Médecin des hôpitaux, pédiatre, psychanalyste (membre fondateur de l'école freudienne de Paris), elle fut l'une des premières en France à s'intéresser au destin des très jeunes enfants séparés de leurs familles. Dès la fin de la guerre de 39-45, elle prit conscience de l'effet désastreux de la carence des soins maternels ainsi que de l'absence du père chez ces milliers d'enfants privés, du fait de la guerre, de présence et d'attention paternelle (le chapitre 4 : «Pères absents : figure de la carence en temps de guerre» est particulièrement riche, susceptible d'éclairer bien des cas actuels). Jenny Aubry dirigea à l'époque la Fondation Parent de Rosan, dépôt de l'Assistance publique où étaient hébergés une soixantaine d'enfants bien traités par des infirmières qui ne s'occupaient cependant que de leur santé physique. Privés de paroles et d'affect, ils poussaient des grognements, demeuraient immobiles des heures durant, léchaient les barreaux de leurs lits ou s'arrachaient les cheveux. C'est ce que parallèlement en Grande-Bretagne le psychanalyste René Spitz avait appelé «hospitalisme». Jenny Aubry entreprit de démontrer avec succès que ces enfants souffraient de problèmes psychiques qui les condamnaient à terme à la délinquance, la folie ou l'autisme. Il fallait donc mener avec eux un travail de psychothérapie précoce, seu
Critique
L'école maternelle
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publié le 18 décembre 2003 à 2h23
(mis à jour le 18 décembre 2003 à 2h23)
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