Au-delà de la limpidité de son titre (Etre juif), le livre de Benny Lévy est un livre difficile, mais ce serait mal le lire que de croire qu'il a été écrit dans une langue étrangère. Il s'adresse à nous du début jusqu'à la fin parce qu'il vient de quelqu'un qui est l'un de nous. Le propos est triple : un traité apologétique du Retour (à Israël), un traité polémique contre la spiritualité européenne, un traité de la question du Mal. Ce triple propos se noue autour d'une violente et cathartique dispute avec le Maître, Emmanuel Levinas, dont l'heureuse et dialectique issue justifie le sous-titre, «étude lévinassienne».
L'apologie du Retour possède plusieurs scénarios qui vont de l'épuisement du questionnement européen à la violence de l'appel, en passant par la résistance même à cet appel : ces scénarios sont brièvement exposés par Benny Lévy, car tous les trois convergent vers un même noeud historial, Auschwitz, où s'est radicalisée à l'extrême la nécessité du Retour en confirmant définitivement l'impossibilité factuelle pour le juif d'échapper à son être juif. Moment historial au double sens qu'il fut fin du monde (fin de ce monde pour les juifs) et qu'il s'inscrit dans l'histoire proprement juive du monde, telles les destructions des deux Temples de Jérusalem, et qu'il ouvre alors à une autre histoire que la nôtre (européenne), une histoire immobile.
Le traité polémique avec la spiritualité européenne prend précisément pour point de départ la lecture d'Auschwitz qui, comme évé