En malais, «bulat» signifie «rond comme la Lune». Tout petit déjà, Mohamed Nor bin Khalid avait une tête toute ronde. Son père l'appelait Bulat, ou Lat. Aujourd'hui, Lat a 53 ans, il a toujours une tête ronde et c'est un des dessinateurs les plus célèbres d'Asie. En Malaisie, son pays natal, c'est quasiment un héros national : pour fêter le dernier ramadan, les télécoms ont affiché un de ses personnages sur les écrans des portables, les McDo locaux servent un kampung-burger (d'après Kampung Boy, le plus célèbre de ses albums), et la compagnie aérienne malaisienne veut baptiser un de ses avions Lat. En France, Kampung Boy, mis en scène par un réalisateur américain, a gagné un Prix spécial au Festival international du film d'animation d'Annecy en 1999, mais, en dehors d'une poignée de fans qui ont acheté ses albums en Asie, personne pratiquement ne connaît Lat. Heureusement, le voilà édité, pour la première fois en dehors d'Asie, par Ferid Kaddour, le patron de la toute petite mais très pointue maison d'édition Tête Rock Underground.
Le premier album publié en français, Kampung Boy, est l'histoire d'une enfance malaise dans les années 50. Cet album, paru en Malaisie en 1979, est à la fois un document ethnologique, passionnant et poétique, et un récit autobiographique drôle et touchant. En découvrant les pages aux textes précis, très matter of fact, et au trait rapide, à la fois réaliste, stylisé et gentiment moqueur, on pense autant à Persepolis de Marjane Satrapi qu'au Petit N