Christian Thorel, le patron d'Ombres blanches, à Toulouse, est une des personnalités marquantes du Syndicat de la librairie française. C'est aussi... un «affilié» du Seuil, associé à son capital. Soucieux de ne pas «condamner d'avance et à l'aveugle», il estime cependant que le rachat du Seuil par La Martinière appelle des mises au point urgentes.
En quoi résident vos inquiétudes ?
Sur le plan personnel, j'ai la majorité d'Ombres blanches, et je ne suis pas inquiet à propos de la participation du Seuil, qui ne représente que 6 %, un montant symbolique. Le problème est ailleurs. Il concerne les mutations possibles de la production du Seuil et les risques qu'elles pourraient présenter pour les réseaux de la librairie indépendante. Je dis bien «pourraient», car il ne s'agit pas d'accusations, mais d'inquiétudes devant le silence qui, jusqu'à présent, entoure cette opération. En perdant son autonomie financière, Le Seuil peut se voir obligé d'infléchir sa politique éditoriale. Si la société avait été reprise par une «maison de tradition», nos appréhensions ne seraient pas les mêmes. Mais, quelle que soit la réussite de La Martinière, qui a été acquise sur un segment très court (les livres illustrés), on ne peut pas dire qu'il existe, en son sein, une tradition éditoriale. Et les récentes déclarations de Hervé de La Martinière à la presse ne sont pas pour nous rassurer. On sent bien qu'il appartient à une logique économique qui veut que chaque livre soit rentable «en soi». A la Cro