La collection est de toutes les cultures et de tous les temps parce qu'elle participe de deux inquiétudes, voire de deux passions : celles d'accumuler et de préserver pour transmettre aux générations futures. Pendant longtemps, la dimension religieuse fut essentielle. La collection en tant que «réunion d'objets merveilleux gardée dans un réduit sacré» est connue depuis le paléolithique, et les trésors d'église ou de monastère du Moyen Age, avec leurs objets précieux et leurs reliques de saints, en sont l'illustration dans la culture chrétienne. La collection particulière est d'apparition tardive, tout comme son successeur qu'est le musée. C'est cette histoire qui, depuis longtemps, intéresse Krzysztof Pomian.
Venise tient un rôle central dans cet ouvrage, car, en matière de collection, la cité de la lagune a beaucoup inventé. Après la disparition de Rome et une éclipse longue d'un millénaire, la collection particulière apparaît de nouveau dans l'atmosphère de l'humanisme italien, sous l'influence de Pétrarque qui enseigne à l'Italie que les antiquités, clés pour comprendre les écrits des Anciens, ont une valeur au moins comparable à celle des reliques. Il faut donc les rechercher, les préserver et les étudier. C'est dans cet esprit que Venise devient au XVIe siècle l'une des premières villes pour les antiquités. Un changement important s'opère pourtant avec la Contre-Réforme catholique qui, en imposant l'identification exclusive du sacré au sacré chrétien, retire aux antiquit