Hongkong envoyé spécial
En lisière de la Chine, un peu en elle mais pas tout à fait, Hongkong maintient. C'est un petit territoire de 6,8 millions d'habitants à forte charge symbolique : une île au bord du continent pleine de colonnes, d'énergie et d'argent. Dans cette île, les écrivains sont des îles. Ils flottent. Comme la plupart des habitants, ils viennent souvent d'ailleurs, de familles immigrées. Leur identité est mouvante. Ils écrivent pour la plupart en chinois, dont les caractères sont partout les mêmes, mais ne parlent pas forcément la langue locale, le cantonais, ni la langue de l'ancien maître, l'anglais. Ils sont rarement publiés en Chine continentale, parfois à Taiwan. Ils ont peu de lecteurs. Ils sont cultivés, discrets et minoritaires. Ils portent souvent la traduction jusqu'à l'abstraction. L'amour de la littérature et une certaine délicatesse semblent leur servir de bagages : ils voyagent profond et léger. Le recueil d'Annie Curien, à paraître chez Gallimard, en retient pour la première fois douze, un par nouvelles.
Beaucoup, mais pas tous, écrivent désormais des textes courts. C'est une tradition chinoise remontant aux années vingt; mais les raisons sont aussi économiques : ils vivent pour écrire, mais n'en vivent pas. Ce sont des écrivains du dimanche, de vacances ou de nuit. Hongkong est une ville rapide qui bande ses contrastes ; on y marche derrière ses rêves, très vite, sans s'arrêter. Eux imaginent dans les interstices. Leurs textes précis, concentrés,