Pour rencontrer l'écrivain Chi Li, il faut passer les barrages de police, montrer patte blanche. Dans cet hôtel du centre de Pékin, Chi Li est «Madame la députée de l'Assemblée populaire», venue de sa ville de Wuhan pour participer aux travaux parlementaires, pas l'auteur à succès. Pourquoi être devenue députée ? «Je suis revenue de voyage en 1998, et j'ai trouvé une lettre m'informant que j'avais été élue», explique tout à fait sérieusement cette femme de 47 ans, à l'allure stricte.
Depuis, elle s'est prise au jeu, et soulève dans ce Parlement communiste sans réel pouvoir des questions sensibles comme le sort des paysans ou celui des enfants pauvres privés d'école. «Je ne resterai peut-être pas députée très longtemps, je suis trop franche», dit-elle.
Aux antipodes de la discipline du Parti requise d'un «élu» du peuple, Chi Li se dit «sceptique sur tout», et en particulier vis-à-vis «des slogans et des grandes campagnes». «Je tiens seulement à ma propre conception des choses.» Un blindage hérité de la Révolution culturelle : «Mes parents ont été chassés et battus ; très jeune, j'ai dû survivre seule, me nourrir, me protéger, distinguer le bien du mal, je ne pouvais compter que sur moi.»
Devenue médecin malgré elle à l'issue de la Révolution culturelle, lorsque le choix des études des Chinois était encore décidé par le Parti, elle s'est vite dirigée vers sa vraie passion, l'écriture. En jetant ce qu'elle qualifie elle-même de «regard froid sur la réalité». Au point d'incarner un