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Libération
Critique

Montée des cendres

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Concerto allegro de Vladimir Tasic autour des restes d'un frère mort revenu par la poste.
publié le 8 avril 2004 à 0h09

Le coup du Serbe installé au Canada, qui écrit des romans admirables et admirablement traduits en français par Gabriel Iaculli et Gojko Lukic, on nous l'avait déjà fait. Il s'appelle David Albahari, et on en a dit tout le bien qu'on a pu, on était tranquille. Et puis non, à l'autre bout du pays, au Nouveau-Brunswick (Albahari vit à Calgary, en Alberta), en voilà un autre qui se lève, il a vingt ans de moins, mais tout aussi drôle et savant, aussi malin et talentueux. Et pas rancunier pour un sou, Vladimir Tasic. Page 121 de son livre, on peut lire : «Il y a longtemps, j'ai acheté à la librairie serbe de Toronto un exemplaire du Livre bref de David Albahari. J'ai manqué de prudence en payant avec ma carte de crédit.» En effet, inscrit au fichier des lecteurs d'Albahari, il ne tarde pas à se faire harceler de propositions à Serbes, mais ce n'est pas le sujet du livre, juste un clin d'oeil.

Le sujet du livre est l'exercice virtuose de l'art de la digression, du portrait et des considérations drôlement tristes et tristement drôles sur la vie, la mort et les Chinois qui tombent de vélo en souriant. Le tout bien encadré entre un début et une chute impeccable, plein de suspense et d'unité de temps puisque tout une vie (et même plusieurs) se raconte en une seule journée d'hiver au Canada. Un beau matin, le narrateur, qui occupe un poste important à ne rien faire dans une entreprise florissante de didacticiels médicaux (dans une ville dont le nom ne nous dirait rien et où l'auteur lui