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Libération
Critique

In Vico veritas.

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publié le 29 avril 2004 à 0h24

Le chirurgien avait prédit qu'il mourrait ou qu'il resterait idiot. A sept ans, il était tombé du haut d'une échelle, tête la première, avait eu «la partie droite du crâne fracassée», et perdu «beaucoup de sang par les trous nombreux et profonds de la tumeur qu'avait occasionnée la chute». Il était resté «bien cinq heures sans connaissance». Mais «la prédiction, Dieu merci, ne se vérifia point». D'aucuns cependant le traiteront, beaucoup plus tard, d'insensé et de fou, ou, «avec plus de politesse, d'extravagant, d'esprit obscur aux idées singulières». D'autres diront pensée inintelligible. Balzac le raillera dans l'Illustre Gaudissart. Même Karl Marx, qui l'admirait, dira la difficulté à «se tirer» de son oeuvre, écrite dans «un idiome napolitain très compliqué». Il était, lui, parlant à la troisième personne, assurément plus confiant : «A la suite de cette maladie et après sa guérison, Vico devint d'un naturel mélancolique et pénétrant, propre aux hommes ingénieux et profonds qui brillent par les traits de leur ingegno [esprit] et qui sont trop réfléchis pour aimer les arguties et le faux».

En même temps qu'une importante étude sur l'ensemble de sa pensée (les Archives de l'humanité, d'Olivier Remaud) paraissent aujourd'hui, de Giambattista Vico, la Vie écrite par lui-même, dans la traduction qu'en fit Michelet, ainsi que les Vici vindiciae («les revendications de Vico»), traduites pour la première fois du latin : occasions de focaliser encore une fois l'attention sur ce phi