Affalée nonchalamment dans un profond fauteuil, drapée d'un bleu azur qui met en valeur sa chevelure argentée, la Reine mère du Crime vous dédie un sourire malicieux. «Vous savez, dit-elle, j'ai 83 ans et ma vie aujourd'hui est tellement agréable. Je peux enfin écrire en prenant mon temps. Bien sûr, si mon éditeur me demandait de lui donner un roman chaque année, j'y arriverais... mais heureusement ce n'est pas le cas. J'ai tout le loisir de mûrir calmement une intrigue, de m'intéresser à la vie de chacun de mes personnages. C'est tellement important de savoir comment ils ont vécu : c'est ce qui fait l'intérêt d'un roman d'énigme. Et je ne me mets à l'écriture qu'une fois en possession de tous les éléments du mystère.»
Les fidèles de l'oeuvre jamesienne savent à quel point l'ancienne fonctionnaire du Home Office britannique tient à la vraisemblance de l'investigation policière, même si ses livres n'ont rien du récit froidement agencé d'une affaire criminelle tout droit sortie des archives de New Scotland Yard dont elle connaît le fonctionnement de l'intérieur comme aucun de ses collègues. Non, cette inconditionnelle de Jane Austen et de Dorothy Sayers est avant tout romancière. Et dispensatrice d'une forme de fiction qui a ses règles et ses références parfois subtiles. Ce n'est pas un hasard si l'action de la Salle des meurtres a pour cadre la Lande de Hampstead où jadis apparut la fameuse Femme en blanc de Wilkie Collins. Penchée vers vous, avec une mine de chatte gourmande,