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Libération
Critique

Boulevard du cri

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Jean-Yves Mollier se penche sur l'activisme antisémite des camelots, figures populaires de la fin du XIXe siècle.
publié le 27 mai 2004 à 0h47
(mis à jour le 27 mai 2004 à 0h47)

«De chaque pavé sort un camelot», écrit en 1905 le magazine Lectures pour tous, qui consacre un long reportage à l'univers pittoresque de ces petits revendeurs «qui grouillent et clament sur l'asphalte de nos boulevards». Tous styles confondus (camelots «étalants», crieurs de rue, marchands des quatre saisons, bonimenteurs, hommes-sandwichs, etc.), ils étaient alors près de 150 000 en France (dont 20 000 à Paris) à interpeller le badaud. Historien du livre et de la lecture, Jean-Yves Mollier s'est intéressé aux plus toniques de ces camelots, les vendeurs de journaux, chansons, brochures et autres «papelards», qu'il a suivis au temps fort de leur activité, dans le Paris de la Belle Epoque.

Héritier du colporteur et des traditionnels cris de Paris, le camelot n'y est pourtant pas un nouveau venu. Mais les transformations de la ville et l'invention de la grande presse, qui a imposé la vente au numéro, ont fait de lui une figure plus familière, à l'activité plus instable et précaire également. Son univers, c'est celui de la «librairie du trottoir», surprenant mélange d'archaïsme et de modernité. On y retrouve les journaux bien sûr, qui vivent alors leur âge d'or, mais aussi un ensemble divers d'imprimés (chansons, brochures, cartes postales, placards, papillons, «coins gommés», faire-part ou testaments parodiques) et d'objets amusants (farces et attrapes, jeux de cartes, pantins à tirette, pipes et effigies, etc.) Un style en émane, qui cultive la gouaille, la provocation et la f