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Libération
Critique

Michel-Ange et démon.

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De l'amour des garçons comme voie du Salut : Michel Masson revisite la chapelle Sixtine.
publié le 17 juin 2004 à 1h06

Que Michel-Ange aimât passionnément les garçons se laisse facilement deviner au premier coup d'oeil à la chapelle Sixtine dont il a empli la voûte et les coeurs de jeunes gens à la nudité triomphante. Mais que l'amour homosexuel y soit non seulement représenté mais célébré comme une voie privilégiée vers le Salut, c'est beaucoup moins évident. Et pourtant, c'est à cette scandaleuse conclusion qu'aboutit Michel Masson dans la Chapelle Sixtine. La voie nue, un essai novateur qui, donnant évidemment comme acquis le génie michelangélesque, met en revanche en lumière certains ressorts philosophiques, théologiques et psychologiques qui en ont nourri le programme artistique. Le scandale avait déjà éclaté du temps de Michel-Ange lui-même et on avait même couvert quelques nudités trop crues, voire pornographiques, mais on n'y avait vu que paillardise ou provocation de la part d'un peintre harassé par le travail et poussé à l'excès par une noire mélancolie. Or la lecture de Masson ouvre des perspectives infiniment plus stimulantes car, insiste-t-il, il ne faut pas oublier que la chapelle Sixtine est une église. Certes, cela faisait quelques dizaines d'années que le nu était apparu dans l'art religieux, par exemple avec Luca Signorelli à la cathédrale d'Orvieto, mais pour mieux représenter l'abjection de la chair et du pécheur, car le mal y est nu et la vertu bien habillée, alors que chez Michel-Ange la nudité ne semble en rien associée à la faute.

Les nus qui partagent l'espace peint