Cette histoire aurait pu naître de la collaboration pateline et beaucoup moins improbable qu'il n'y paraît de la romancière Ruth Rendell et du dramaturge Joe Orton. Tous deux auraient néanmoins reconnu que le personnage de Charlotte Bach était presque trop beau pour être vrai... Et pourtant, qui eût cru qu'un «sexual misfit» aussi impressionnant et déroutant que l'héroïne du livre de Francis Wheen ait pu arpenter la scène londonienne des Swinging Sixties avec autant d'aplomb que Miss Bach ?
Tout commence avec la naissance à Budapest, en 1920, de Karoly Hajdu, un enfant de sexe mâle qui prendra très tôt plaisir à s'habiller en fille et qui, plus tard, après nombre d'aventures plus ou moins racontables ne se fait-il pas photographier pendant la guerre en uniforme nazi ? , fuit la Hongrie pour l'Angleterre. Là, c'est un dandy portant moustache à la Clark Gable qui, fort de diplômes imaginaires, passe de fraude en arnaque et mystifie tout le monde. Le «baron Carl» mène grand train, épouse une certaine Phyllis et fraie avec la gentry.
La deuxième métamorphose d'Hadju est encore plus audacieuse. Devenu Michael Karoly, il s'inscrit à la Société d'hypnothérapie, commence en secret à écrire, publie en 1961 un petit ouvrage intitulé Hypnosis et, fort de son nouveau talent de psychologue, n'hésite pas à escroquer quelques-uns de ses amis de la bonne société. C'est alors que Phyllis meurt dans un accident et que s'accomplit la troisième et plus spectaculaire métamorphose. Le «baron» fa