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Libération
Critique

Conquête de l'Est.

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Les aventures amoureuses et politiques du capitalisme dans les pays de l'ex-bloc.
publié le 30 septembre 2004 à 2h21

Au risque de casser la baraque commerciale de l'éditeur, précisons que, contrairement à ce que promet son titre, ce livre n'a pas grand-chose d'érotique, sinon au sens strictement littéral, puisqu'il évoque l'amour de Benderson pour Romulus, un prostitué rencontré en Hongrie. Quant à l'autobiographie, nul projet ici ni perspective, plutôt le récit d'un bref épisode, lequel trouve certes des racines dans les origines familiales et au chevet de la mère mourante, «quand elle était la seule Juive d'un petit village du nord de l'Etat de New York, et qu'elle se mordait la langue, le visage rouge d'humiliation, tandis que le professeur goy déblatérait sur la personnalité méprisable de Shylock dans le Marchand de Venise». Tout ça n'empêche pas ce Roumain (titre anglais) d'être doux, fin, texturé, ni qu'on sente battre les veines au travers. Mais il reste quand même plutôt un essai politique et psychologique, où l'on s'assure que «certaines vies sont le fruit d'un accident historique».

On attendait l'auteur de Toxico au tournant d'un bouge bien moite, on le retrouve sagement plongé dans une traduction de Céline Dion (c'est son gagne-pain) et la lecture d'une biographie de Carol II et d'Helena Lupescu, juive justement, accusée par son peuple d'avoir corrompu le roi roumain. Comme dans ses autres textes, Benderson est atteint du syndrome de Des Grieux, et il voudrait faire éprouver de l'amour à une pute. Or, comme dit Manon, on n'est pas bien tendre quand on meurt de faim et l'on craint