Eduardo Galeano, grand chroniqueur des méfaits du tabac politique et pourfendeur patenté du libéralisme, avait par avance commenté la mascarade polynésienne. En 1993 au Brésil, raconte-t-il, un petit parti avait acheté des députés d'un parti rival pour atteindre le quota lui permettant de se présenter aux élections présidentielles. Coût : trente mille dollars. «C'est ce que font les joueurs de foot quand ils changent de club», se justifia un député acheté. Quatre ans plus tard, deux autres députés furent «échangés» pour deux cent mille dollars pour une autre magouille, le cours avait monté. Combien vaut un député polynésien ? «L'auteur a fini d'écrire ce livre en août 1998. Si vous voulez savoir comment il continue, lisez, écoutez ou regardez les nouvelles tous les jours», écrit l'auteur de Veines ouvertes de l'Amérique latine. Fait de grands chapitres et de petits encadrés d'anecdotes en forme de fables, il épouse ironiquement le déroulé d'un cours magistral (ce livre l'est, magistral) : «Cours élémentaire de racisme et de machisme», «Enseignement de la peur», «Cours intensif d'incommunication».
Galeano est attentif à l'usage des mots. Comment dire, autrement, le mot torture ? En Israël, un tribunal (en l'autorisant) a parlé de «pression physique modéré», en Amérique latine on a eu l'idée de «contraintes illégales». En Colombie, les escadrons de la mort disent être des «groupes de propreté sociale». Et pour les cadres argentins du Banco Nación, le pot-de-vin qu'ils ont reçu