Si l'on excepte les cassettes de Mission impossible, peu d'oeuvres programment dans la paix leur autodestruction et s'y tiennent. Avec son vingt-troisième et dernier numéro, la revue R de Réel y parvient, comme toujours, avec une élégance de guépard. Une phrase de Lichtenberg sert de plaque funéraire à la page d'ouverture couleur linceul : «Il eut donc la meilleure idée qui lui vint jamais : il mourut.» Puis la revue caresse la lettre Z, avant de saluer, en dernière page, ses nombreux collaborateurs «sur son lit de mort».
R de Réel est ou fut en effet une revue abécédaire. Elle est dirigée par deux jeunes auteurs, Raphael Meltz et Laetitia Bianchi. Des écrivains comme François Bon, Eric Chevillard et Pierre Senges y collaborent régulièrement. Le principe est simple : chaque numéro saisit une lettre (ou deux parfois) de l'alphabet. Puis chacun choisit certains mots commençant par cette lettre. Les articles sont parfois des définitions, parfois des fictions, parfois des réflexions, parfois de la critique. Une iconographie, une typographie et une mise en page très soignées, pleines de fantaisie et de raffinements, accompagnent ces textes.
A la lettre Z, on trouve un article sur Zinedine Zidane, sur l'onomatopée Zzz, sur Frank Zappa, sur Zapato et sur Zapata, sur Zorro bien sûr, et encore sur Led Zeppelin (par François Bon) et le portrait d'un zoolâtre (par Eric Chevillard). L'un des textes les plus plaisants est un débat imaginaire, arbitré par un certain Monsieur Z, entre