lbum signifie blanc, en latin, mais ça ne fait rien, Claude Ponti met de la couleur partout, tout plein les grandes pages, à l'aquarelle, pour un grand livre comme Blaise et le château d'Anne Hiversère, ça prend des mois, et avant il a fallu repasser à l'encre les traits qu'il avait bien fallu dessiner au crayon après qu'on les avait inventés dans la tête pendant des années parfois, si bien que l'album, il n'y a que lui, Claude Ponti, qui l'a connu blanc, sans compter ce que les enfants y ajoutent, entre les lignes, entre les pages, dans le blanc du cadre. Sauf une fois, dans l'Ecoute-aux-portes, lorsque Mine enfile sa chemise de nuit et que la chemise se dérègle un peu, on entend un petit bruit, et, quand la tête ressort, tout est vide et plat et blanc, même ses traces de pas, même son ombre blanche sur le sol blanc, sauf le ciel qui est vert en attendant qu'il neige. Les pages des livres sont blanches parce que les lettres sont tombées lorsqu'elle marcha dessus, Mine. Après, tout s'arrange, les personnages de toutes les histoires du monde redescendent du Mont-Sitoubli et les pages du livre retrouvent vie et couleurs. Voilà, sinon, pas de page blanche. Les livres, il faut les ouvrir de temps en temps pour surveiller si tout va bien à l'intérieur, les personnages ont besoin de voir le jour, regardez le petit chaperon rouge que rencontrent Parci et Parla, il est devenu aveugle parce que personne n'a ouvert le livre de son histoire depuis mille ans. Ça abîme les yeux.
Tous les