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Libération

Chagrin d'humour

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publié le 16 décembre 2004 à 3h31

C'est comme si Augusto Monterroso était réduit à l'humour comme on l'est à l'impuissance, ou à la puissance. Pour l'écrivain guatémaltèque né en 1921 et mort en 2003 après avoir vécu au Mexique, il est un compagnon secret, à la fois ami et ennemi. Mouvement perpétuel est composé de brefs textes pleins de fantaisie, d'excentricité et, donc, de drôlerie. L'humour y est autant objet que sujet. Dans des pages sur les palindromes, ces phrases qu'on peut lire semblablement dans les deux sens (mais il y a aussi «les faux palindromes» qui ne se lisent tout bêtement que de gauche à droite), il s'intéresse aux multiples problèmes que fait toujours surgir l'humour des autres. «Shakespeare avec ses jeux de mots terrifie ses traducteurs (c'est bien fait pour ces traîtres), lesquels se voient obligés de recourir à la note en bas de page pour expliquer que telle chose signifie telle autre et que c'est là que c'est drôle.» «L'humour, c'est le réalisme porté à ses ultimes conséquences», écrit aussi Augusto Monterroso. Rire ne serait plus le propre mais le sale de l'homme. Le personnage d'un autre texte d'une page en expérimente la cruauté. Il fait un pastiche à ses yeux ridicules d'une exégèse de Gongora dont seul un des quatre amis à qui il le montre comprend la drôlerie, le quatrième n'y voit rien à redire et «se couvre de honte». Alors le héros «écrit soigneusement une bonne fois pour toutes le sens de la "strophe récalcitrante" (...). Il la soumet à ses quatre amis. Le premier réfute la