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Libération
Critique

L'appel de Londres.

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Mac Orlan, Cocteau, Morand, Albert Londres: une analyse du journalisme littéraire, florissant dans les années trente.
publié le 6 janvier 2005 à 23h27

«Rien, après tout, ne nous interdit de croire que le reportage sera la littérature de demain», écrit en 1927 le journaliste Henri Béraud, l'une des principales figures, avec Albert Londres et Edouard Elsey, du grand reportage de l'entre-deux-guerres. «Le reportage fait partie des genres littéraires, surenchérit Sartre quelques années plus tard, il peut même devenir l'un des plus importants d'entre eux.» Ce début de XXe siècle se révéla en effet fort propice à ces convergences. Pour les grands quotidiens, qui avaient perdu durant la guerre une partie de leur prestige et de leur clientèle, le reportage, genre en vogue, était perçu comme l'instrument d'une reconquête. Pour la littérature, alors en proie à la tyrannie du «vécu», il apparut comme l'une des réponses possibles à la crise de la fiction. C'est l'histoire de cette rencontre, et du «lien de complicité conflictuelle» unissant reportage et littérature, qui fait l'objet du livre de Myriam Boucharenc. Y eut-il alors, se demande-t-elle, une phase de reconfiguration ou de «brassage des hiérarchies», sous l'action conjuguée des avant-gardes littéraires et journalistique ?

L'apogée du genre est alors indéniable. Le reporter, que Béraud qualifie de «flâneur salarié», triomphe dans les quotidiens, où sa production a ravi au feuilleton sa place de fer de lance. Figure de l'aventurier modern' style, il s'impose aussi dans les nouveaux hebdomadaires qui fleurissent dans les années vingt (Candide, Gringoire, Détective, Vu, Voilà, etc