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Libération
Interview

«La folie est la seule liberté».

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Vacuité et terrorisme, l'auteur de «Crash !» livre sa vision du monde contemporain. Entretien.
publié le 13 janvier 2005 à 23h35

Shepperton envoyée spéciale

L'adresse n'a pas changé depuis plus de quarante ans. James Graham Ballard habite à Shepperton, petite ville de la banlieue de Londres, terminus d'un train pris à Waterloo Station. Dans la petite pièce qui donne sur la rue, un immense tableau de Paul Delvaux mange le mur, écrase l'arrivant ou le happe. Une belle femme assise, hiératique, les mains jointes devant elle, se regarde nue dans un miroir. La taille de la toile contraste avec l'atmosphère confinée des lieux. Ballard dans son jus, grand bonhomme affable qui s'inquiète de votre bien-être au beau milieu d'une tirade enflammée et acide contre cette société-là. Entretien.

On se représente désormais Ballard vivant dans sa maisonnette de la banlieue londonienne, à Shepperton, devant un Paul Delvaux, le Miroir, qui n'est qu'une copie. Vous avez cultivé cette image ?

C'est une petite maison. J'ai seulement deux pièces en bas. Et chacune des deux possède une peinture. Et c'est difficile de me prendre en photo ailleurs. C'est seulement une coïncidence. Mais j'adore véritablement cette toile. Je vis à l'intérieur, avec cette femme splendide. L'original a été détruit pendant les bombardements sur Londres en 1940. Elle a seulement survécu en photographie et je l'ai fait copier il y a une quinzaine d'années. Je l'aime parce qu'elle représente une sorte de rêve nostalgique d'un paradis rempli de femmes endormies. Quand nous dormons, nous atteignons ce monde. C'est un rêve romantique, un peu comme le Bain tu