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Libération
Critique

Indridason, pécheurs d'Islande

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L'Ile d'Indridason, gangrénée par la violence, n'a plus rien d'enchantée.
publié le 10 février 2005 à 0h29

La Cité des Jarres est le septième roman policier d'Arnaldur Indridason, journaliste et critique de cinéma qui vit à Reykjavik. Le ciel y est constamment bas et lourd comme un couvercle, on sort rarement de la ville sauf pour une exhumation. Atmosphère étrange et mortifère, avec une vieille dame qui hurle à un inspecteur de police, comme pour le frapper d'une malédiction : «Que les trolls emportent votre enquête !» Quelques pages plus loin, un chercheur en génétique savoure du xérès en babillant sur le coeur de Louis XVII, prélevé lors de son exécution, peu avant ses dix ans, ce qui permit plus de deux cents ans plus tard des révélations sur la descendance de la famille royale française...

S'il est question de viol, de sang, de filiation, d'arbre généalogique, ça n'est pas un de ces polars médicaux supposément haletants que plie Indridason. L'interrogation centrale est existentielle, dans le sillage d'Erlendur, vecteur du récit à la fois très logique, factuel, et empirique : «Il pensa aux mères et aux filles, aux pères et aux fils, aux mères et aux fils, aux pères et aux filles, aux enfants qui venaient au monde et que personne ne voulait, aux enfants qui mouraient dans cette petite société, l'Islande, où tous semblaient dans une certaine mesure appartenir à la même famille.» Tout le livre est empreint de ce sentiment : la nostalgie d'un Eden, la douleur d'avoir à renoncer à cette idée que l'Islande, ce territoire de 103 000 km2 (environ un cinquième de la France) peuplé de 2