Depuis le travail capital accompli en solitaire par Raul Hilberg, les historiens se sont, tardivement mais énergiquement, penchés sur la Shoah, s'efforçant, en multipliant les grilles d'analyse et en sondant les archives, de mieux saisir à défaut de toujours les comprendre les ressorts du drame majeur du vingtième siècle. La volumineuse étude que Florent Brayard (historien de l'Institut d'histoire du temps présent) consacre à la Solution finale s'intègre ainsi dans un puissant mouvement de réflexion que Christopher Browning, Philippe Burrin ou Christian Gerlach, pour ne citer qu'eux, ont contribué à animer. Dans ce débat en perpétuel renouvellement, Florent Brayard verse à son tour une imposante contribution.
Les années 80 avaient été dominées par une controverse opposant intentionnalistes (persuadés que Hitler avait méthodiquement appliqué un programme d'extermination conçu dès l'avant-guerre), aux fonctionnalistes (défendant l'idée que la Shoah découlait au fond d'une pluralité de décisions prises, sans coordination, par les dirigeants de la polycratie nazie). Le premier mérite de Florent Brayard est de remettre quelques pendules à l'heure. Tout en refusant de chercher la date de la décision qui aurait commandé la destruction des juifs d'Europe (quête qui a longtemps polarisé l'attention de la recherche internationale), il montre, de façon tout à fait convaincante, que cette destruction résulte bien d'une décision politique, prise au plus haut sommet de l'Etat par Himml