En exergue du livre, il a placé la phrase du journal de Kafka en date du 2 août 1914 : «L'Allemagne a déclaré la guerre à la Russie. Après-midi, piscine.» Il aurait aussi pu choisir ces mots du journal de Louis XVI, le 14 juillet 1789, lors de la prise de la Bastille : «Aujourd'hui, rien.» «La plupart des gens ne vivent pas dans l'histoire, dans l'actualité : au vrai ils vivent leur vie», note l'historien Marc Ferro soulignant que le plus souvent cette «histoire subie» se cristallise sur quelques moments d'une expérience cruciale devenant dès lors omniprésente dans leur mémoire, comme le souvenir des tranchées pour les anciens combattants de 14, ou, après la Seconde Guerre mondiale, les camps de la mort ou le goulag.
Cet essai veut analyser les comportements d'individus dans les affres de moments décisifs comme la Révolution russe, la montée du nazisme, l'Occupation ou la guerre d'Algérie. Il y a le total aveuglement des uns, les étonnantes intuitions d'autres qui, d'entrée de jeu, comprennent ce qui se passe. Et dès lors que faire... Il y a des salauds, des héros et la plupart qui ne sont ni l'un ni l'autre, survivant dans cette zone grise du consensus passif ou de la résignation.
Historien prolifique qui a écrit aussi bien sur la Révolution russe que sur la Première Guerre mondiale, Pétain ou le colonialisme, ce pilier de l'Ecoles des hautes études en sciences sociales et de la revue les Annales a souvent fait oeuvre de pionnier avec ses travaux sur le Cinéma et l'histoire (