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Libération
Critique

Et s'il ne reste Nankin

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Mo Hayder conduit une double intrigue pour une seule terreur.
publié le 31 mars 2005 à 1h15

Le «viol de Nankin», comme le nomme l'historienne Iris Chang dans un livre paru en 1999, qui fit dire à J.G. Ballard qu'il y avait là «comme un trou noir moral et psychologique avalant toute pitié et tout remords», ce massacre d'une ville chinoise par les troupes japonaises en décembre 1937 apparaît au centre du troisième roman de Mo Hayder. Cette jeune Anglaise surtout connue pour ses thrillers, dont l'excellent Birdman, a mûri pendant deux ans à Bath, décor suranné des oeuvres de Jane Austen, un drame psychologique sur fond d'histoire contemporaine.

Tokyo s'ouvre simultanément sur deux récits reliés par la personnalité d'un des narrateurs, l'universitaire chinois Chongming, émigré au Japon pour une raison qui nous paraît d'abord mystérieuse. Nous découvrons le journal qu'il a tenu en 1937 au moment de l'entrée des soldats nippons dans Nankin, où il se trouvait en compagnie de sa femme sur le point d'accoucher. Le récit terrifiant qui se développe nimbe d'une terreur progressive celui de l'héroïne, Grey, une jeune étudiante anglaise venue rencontrer à Tokyo le professeur Chongming. Grey, porteuse d'un terrible secret lié au viol qu'elle a subi à l'adolescence, fait une fixation sur le massacre de Nankin et elle s'est mise en tête de retrouver un film réalisé aux pires moments de l'invasion.

Hayder décrit avec une sensibilité à fleur de peau l'obsession de la jeune fille égarée dans la ville, hallucinée par les lieux qu'elle hante puis par les êtres qu'elle croise. La maison d