SAMEDI.
Les révoltées soumises.
A un récent colloque sur Louise Michel, j'avais choisi un sujet singulier : «Louise : vierge rouge ou icône de Lesbos ?» A la fin, une inconnue m'aborda : éducatrice d'école maternelle, elle me demanda si je viendrais parler à des femmes dans un «quartier sensible», en gardant secret jusqu'au nom du quartier. Au terminus du métro, l'éducatrice m'attend et nous allons vers l'«espace loisirs» d'un grand ensemble, à «espace au féminin» dont l'odeur menthe, fleur d'oranger m'annonce un thé de fête. Vingt visages de 15 ans à la cinquantaine offrent tous les tons de l'ambre à l'onyx. Surprise : à mon époque militante, j'appris que les Afriques, même en exil, demeuraient séparées par le Sahara. Sont-elles, ici, réunies par le voisinage ou la religion ? Les cheveux sont libres, les yeux soulignés...
Nous parlons d'abord de leur image dans les médias. Elles n'ont rien nié : les mariages forcés (illégaux), le viol, le deal et l'excision ? «Malheur, dit une Dahoméenne, on ne le découvre qu'après : trop tard.»
N'empêche : les filles réussissent de mieux en mieux à l'école. Fierté des mères. Et des pères ? «Surtout s'ils travaillent, dit l'éducatrice, les chômeurs écoutent bien plus les religieux.» Une fille de 15 ans, amère : «Oui, ils leur mettent un pansement à l'orgueil.»
Une aînée volumineuse murmure : «Nos mères échangeaient des recettes amoureuses pour garder leurs hommes fidèles.» Elles rient toutes, complices,