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Libération
Critique

Reflet dans un oeil sarde

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Dans les îles, on tue comme ailleurs et on le fait savoir. La noire Sardaigne des insulaires Giorgio Todde et Marcello Fois.
publié le 7 avril 2005 à 1h36

Vis-à-vis du monde, de la vie et du reste, les gens des îles (comme tout un chacun, probablement) peuvent être îliens ou îlotiers, migrants ou casaniers. Les uns aiment que la mer leur ouvre les horizons lointains, les autres la craignent et lui tournent le dos. Tel mise sur l'immuable et espère ne rencontrer que des semblables, tel autre, en revanche, oeuvre à s'éloigner de soi-même, en (se) racontant. Pour tous, le rivage est un seuil, le bord de la parole et du sentiment, avant d'être celui de l'eau et de la terre. Aussi, depuis Ithaque, y a-t-il des îles à histoires et des îles muettes. La Sardaigne est des premières, île écrite qui ne cesse de s'écrire (la Sicile en est une autre, pour rester en Méditerranée). Nombre de nouveaux écrivains l'attestent, qui dernièrement se sont affirmés sur le continent italien, souvent en même temps qu'en France, et parfois ici avant que là-bas. Succédant à des auteurs très portés sur l'éternel de la littérature (Grazia Deledda, la deuxième femme à avoir décroché le prix Nobel de littérature en 1926, Salvatore Satta et son Jour du jugement ou encore Sergio Atzeni, trop tôt disparu), la plupart d'entre eux pratiquent le polar, soit pour le dynamiter de l'intérieur, soit pour le porter au-delà de ses limites, soit pour l'accomplir de manière inédite. Ces démarches peuvent se mêler et aboutir chez des écrivains talentueux comme Marcello Fois ou Giorgio Todde, à un genre bien à eux (1).

Giorgio Todde, le dernier arrivé, est né en 1951 et est