Dans une de ces brochures qu'il sème par poignées, A propos d'Utopie (1), Jean Baudrillard résume son parcours commencé à Reims le 27 juillet 1929 : «Je suis passé d'abord par une radicalité poétique et métaphysique Hölderlin et Rimbaud... , entre vingt et trente ans, à la subversion politique, la Guerre d'Algérie, le gauchisme, etc. Ensuite, il y a eu un passage où il a fallu transformer la radicalité politique qui n'avait plus d'enjeux pour laquelle on ne sentait plus d'enjeux... en une radicalité théorique. C'est un parcours, somme toute, qui n'a rien d'original.» Rien d'original ? Peut-être, mais seulement dans la mesure où Baudrillard est plus singulier encore qu'original, ce dont ses lecteurs peuvent aujourd'hui mieux prendre la mesure.
Parmi les signes de la reconnaissance que s'est gagnée un écrivain ou penseur français contemporain, un des plus éloquents est de lui voir consacrer une de leurs monographies par les Editions de l'Herne. Cela vaut une exposition au Grand Palais, ou presque. Le Cahier Baudrillard ne déroge pas à la règle de la série. Il est copieux et inégal, passionnant quoique gâché par son ton uniment élogieux. Impossible de résumer les quelque trente contributions signées le plus souvent par des enseignants. L'oeuvre de Baudrillard y est reprise sous toutes ses facettes : la sociologie, les Amériques, l'échange, l'événement, l'architecture ou la photographie (entre autres). Une collaboration se détache de l'ensemble, qui sera sans aucun doute l