Berlin de notre correspondante
Soixante ans après la fin de la guerre, les discours du chancelier allemand sont toujours une source d'étonnement. A chaque fois que Gerhard Schröder se tourne vers le passé de son pays, il rappelle que sa génération, qui n'a pas connu le nazisme, peut être fière d'avoir ancré l'Allemagne dans les démocraties occidentales. De fait, pour les Allemands, la conquête de la démocratie s'est avéré être un chemin de croix par rapport aux autres pays européens. Pas seulement à cause des douze années de régime nazi. Avant 1933, l'Allemagne avait déjà derrière elle une longue tradition antiparlementaire. Même Thomas Mann se méfiait de ce système politique. Considéré comme l'un des papes de l'histoire allemande, Heinrich August Winkler, professeur à la prestigieuse université Humboldt de Berlin, a inventé il y a quatre ans une belle formule pour résumer deux siècles de cette histoire tourmentée : «Le long chemin vers l'Occident». Couronné par plusieurs prix, vendu à 60 000 exemplaires, son ouvrage, déjà traduit en italien et prochainement en anglais, sort en France sous le titre plus didactique d'Histoire de l'Allemagne XIXe-XXe siècle.
Si ce livre, fort débattu à sa sortie en Allemagne, fait événement, c'est avant tout à cause du regard totalement neuf qu'il porte sur l'histoire allemande. Jusqu'alors, aucun des grands historiens allemands n'avait pris en compte l'impact de la réunification de 1990 dans l'appréciation des événements passés. Décédé en 1992,