Il s'agit d'un brillant essai sur les règles du jeu matrimonial, écrit par un professeur de philosophie éthique à la faculté protestante de Paris, mais aussi membre du comité de rédaction de la revue Esprit et récemment nommé au Comité national d'éthique (une chance, pour le comité...). Le mariage, dit-il, sera une question bientôt dépassée ; et même le divorce, décidément encore trop tragique. Tout ça c'était bon pour les familles antiques ; la tragédie, c'est fini, maintenant on aime le fun et notre société valorise avant tout les «projets» (par exemple : le «projet parental», carte de visite obligatoire pour concevoir un enfant, ou, à l'inverse, une «absence de projet» vue comme un signe patent de dépression). Dans un projet, on met toutes ses forces pour que l'entreprise soit la plus longue possible, mais pas plus. On sait bien que cela s'achèvera un jour, car rien ne vaut qu'on y passe sa vie entière. Par conséquent, si on se marie encore c'est pour le plaisir d'une belle fête, mais si le projet échoue, on divorcera sans trop de douleur et, la plupart du temps, on se remariera de nouveau (nouveau projet).
Ces propos dont l'auteur souligne volontiers l'aspect un peu schématique dépeignent pourtant cet entre-deux actuel dans lequel le mariage oscille entre le tragique et le comique, faisant le grand écart entre des pratiques archaïques et des arrangements ultramodernes. Mais c'est en philosophe qu'Olivier Abel s'interroge sur l'«éblouissante invention du jeu conjugal actue