Dans la grande famille des écrivains voyageurs, il y a le clan très fermé des pèlerins érudits. Non contents d'arpenter le vaste monde, ils en explorent aussi les bibliothèques et ne dédaignent jamais le bric-à-brac des souks et des bazars à la recherche de quelque Atlantide perdue entre les pages de grimoires en lambeaux. Ecrivain et journaliste britannique, nourri d'une solide culture médiévale, William Dalrymple fouille ainsi l'Orient depuis une vingtaine d'années, chassant les âmes et les mystères, se glissant dans le secret des archives et des mémoires parce qu'hier est toujours dans aujourd'hui. Dans l'Ombre de Byzance (Noir sur Blanc, 2002), il plaçait ses pas dans ceux d'un moine voyageur du bas Moyen Age et le pistait de monastère en monastère grâce au manuscrit laissé par le lettré et déniché un peu par miracle dans une vieille bibliothèque conventuelle grecque. Un long périple et une quête de quatre ans, parfois un peu naïve, sur la tragédie des chrétiens d'Orient, décimés et éparpillés par la tempête conquérante de l'Islam et qui s'accrochent aujourd'hui à leurs dernières citadelles branlantes et menacées.
Dans l'Age de Kali (Noir sur Blanc, 2004), changement radical de décor. Loin de tout exotisme, c'est une Inde extrême, dans son quotidien comme dans ses mythes, qui se dévoile à travers une succession de reportages. Aussi bien sur des régions hors de l'actualité, comme l'Etat du Bihar où se déroulent pourtant des guerres absolument sauvages entre les plus pauvre