Dans une même personne, est-ce que peuvent cohabiter un intellectuel et un militant communiste, à savoir quelqu'un qui tout en se singularisant par sa propre signature, sans être nécessairement un individualiste se met au service d'un parti qui se considère, lui, le seul intellectuel légitime quoique collectif ? Plus que malhonnête, ce serait aujourd'hui de mauvais goût ou simplement idiot, sinon suicidaire, alors qu'au siècle dernier mais dans un temps pas si éloigné que cela, ce bizarre centaure fut l'espèce dominante dans la gent intelligente. Intellectuels communistes. Essai sur l'obéissance politique. La Nouvelle Critique (1967-1980), l'ouvrage que Frédérique Matonti consacre à la dernière saison de la revue théorique du PCF, permet de replonger avec bonheur dans une époque bénie et maudite à la fois, où la bataille politique faisait rage autour de la pensée, de la littérature, de la science et des arts. Issue d'une thèse dirigée par Pierre Bourdieu, cette recherche a mobilisé les ressources méthodologiques du maître, mais aussi le jugement sûr et la capacité d'écoute de Frédérique Matonti elle-même, pour croiser enfin l'ethnologie de la culture et l'histoire politique des idées. Une entreprise, donc, d'où anathèmes et louanges sont absents, et qui s'appuie autant sur le dépouillement des articles et des documents d'archives que sur les entretiens avec les protagonistes. D'ailleurs, l'intellectuel communiste et le dirigeant du parti ne se sont-ils pas rencontrés et
Critique
«La Nouvelle Critique», tout ou parti.
Article réservé aux abonnés
publié le 23 juin 2005 à 2h43
Dans la même rubrique