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Libération

Je voudrais parler de hérissons

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par Philippe GRIMBERT
publié le 20 août 2005 à 3h21

Samedi

Cocorico

Doucouré médaille d'or à Helsinki, L'Equipe titre : «Maître du monde». Je suis surpris de ressentir un tel plaisir, d'habitude ces résultats me laissent relativement froid. La France médaille d'or, la France maître du monde, oui je crois comprendre ce qui m'a touché : né dans un pays dont on me disait qu'il était le phare de l'Europe, je l'ai cru avec la foi que l'on accorde aux dires de ses parents et puis, peu à peu, comme à l'adolescence, j'ai ouvert les yeux sur les socles fêlés des statues. J'aimais l'idée d'habiter la plus belle ville du monde, au coeur de la terre des droits de l'homme et, à la suite d'une lente érosion, ces derniers temps un non et une déception olympique ont suffi à me plonger dans la morosité. Je ne me croyais pas cocardier et voilà que je m'étonne de ressentir ce que d'autres, toutes proportions gardées, ont pu ressentir, après Copernic, qui leur a appris que leur terre n'était plus le centre de l'univers, après Freud, qui leur a appris que leur raison n'était plus maître en sa demeure. La France... J'entends de Funès, avec un mouvement de tête de gallinacé, lancer : «La Fraaance !» J'entends mon grand-père qui disait : «Je ne suis pas patriote, mais quand j'entends la Marseillaise...» et finissait rarement sa phrase sans pleurer. Ça me faisait rire, ces histoires de France et aujourd'hui je me réjouis d'une médaille comme si elle annonçait un retour de splendeur. Bon, je n'en suis pas encore à jouer